Le temps des résidences

C’est un plaisir immense et rare que de pouvoir développer ses intuitions intellectuelles et artistiques dans un espace-temps à elles tout entier dédié. Nous sommes au seuil de ces résidences, chacune consacrée à une extension rhizomatique et néanmoins autonome, par l’engagement individuel et la cristallisation formelle, d’un projet d’ensemble dont nous mesurons de plus en plus la force et la nécessité. Depuis 2012, nous menons en effet des pratiques d’enquête sensible sur des territoires et milieux anthropisés. Nous travaillons à la « traduction » esthétique de ces enquêtes, mais plus profondément, essayons d’habiter en artistes et en poètes la réflexivité même de notre recherche empirique. Nous sommes reconnaissants à Bruno Latour de nous avoir engagés sur cette voie prometteuse dont la consistance ne cesse de s’éprouver. Aujourd’hui donc, notre enquête artistique sur l’anthropocène en Louisiane – Gaïa in Nola –, laquelle avait reçue le soutien de l’Institut français et de la Ville de Toulouse, débouche sur des projets originaux qui ont trouvé de nouveaux soutiens et relais. Que ces institutions porteuses d’un projet culturel ambitieux et innovant soient ici remerciées !

« Sortie 17 » à la Maison du vélo (Toulouse)

Sortie 17 est une exposition-performance lente accueillie jusqu’au 20 décembre dans les espaces de la Maison du vélo, face à la gare Matabiau. Le collectif Urbain, trop urbain y travaille à nouveau le matériau issu du projet Périph’Strip et investit progressivement l’espace de créations plastiques inédites. Ce lieu mouvant et générateur d’intensités urbaines nous pousse à improviser cette résidence comme une dérive intérieure.

Une performance mêlant dessin live, musique et récit viendra une nouvelle fois, la même et pas la même, dire ce qui dépasse la ville aujourd’hui — le jeudi 17 décembre dès 18h. Nous vous attendons nombreux !

Livre, encres, dessins, pliages, tirages photographiques sont en vente pendant toute la durée de la résidence et plus spécialement le soir du 17.

Avec Matthieu Duperrex, Claire Dutrait, Jean-Yves Bonzon, Sophie Léo, Frédéric Malenfer et Sébastien Mazauric.

> Maison du vélo, 12 boulevard Bonrepos, Toulouse

« Aujourd’hui Eurydice » au centre d’art Fernand Léger (Port-de-Bouc)

Claire Dutrait achève une première résidence d’écriture à Port-de-Bouc, du 28 novembre au 11 décembre, dans le cadre de sa participation à l’épopée collective (collectif Film Flamme / centre d’art Fernand Léger / médiathèque Boris Vian / cinéma Le Méliès) qui documente de façon artistique le paysage actuel de Port-de-Bouc. Cette première exploration se prolongera notamment par un cycle de performances durant l’année 2016.

Poursuivant son travail de réinterprétation du mythe d’Orphée et Eurydice (avec des textes lisibles sur zoneclaire.fr actuellement sous l’onglet « Notes pour Nola », et avec le mot clé « Eurydice ») Claire élabore une écriture du paysage « sentinelle », une poétique de la catastrophe lente, des métamorphoses et de l’hybridation du territoire, que traversent les rituels et les voix de l’air, de l’eau, du sol, du feu et des humains.

« Sédiment(s) » à la Marelle (Marseille)

Matthieu Duperrex est lauréat de la résidence d’écriture numérique 2015 de la Marelle. Il séjournera à Marseille, à la Friche de la Belle de Mai aux mois de janvier et février prochains.

Le projet de livre numérique explorera une « archéologie » du sédiment qui s’écrit par la mise en écho de deux territoires distincts, éloignés l’un de l’autre, les deltas du Mississippi et du Rhône. Cultures, mouvements migratoires, temps du sol et temps des hommes, modes de vie menacés, érosions… Une poétique, alternant mélancolie et puissance de vie, qui s’appuie sur une enquête de terrain et des outils d’écriture numérique.

« Mississippi Riverbook » au Chalet Mauriac (Saint-Symphorien)

Matthieu Duperrex et Frédéric Malenfer sont lauréats « Numérique 2016 » de l’Écla (écrit, cinéma, livre, audiovisuel, Région Aquitaine). Ils seront accueillis en résidence d’écriture au Chalet Mauriac du 29 février au 25 mars 2016.

Le projet web Mississippi Riverbook consiste à composer une fresque littéraire interactive et sonore du Mississippi. Panorama mobile d’une époque tourmentée de la nature, tel est le paysage que les auteurs donneront à découvrir dans l’écran web. Ce fleuve n’est plus celui de Huckleberry Finn, ni même celui de If I Forget Thee, Jerusalem, bien que la mémoire de cette fougue et de cette wildness demeure. Mais la mécanique des ingénieurs l’a tenu en respect et placé en suspens, séparé de son delta. De là, l’urgence d’une poétique qui témoigne de notre condition contemporaine vis-à-vis des éléments. De là, un récit à venir d’un territoire qui disparaît à une vitesse inouïe.