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Devenirs d’une zone blanche

Devenirs d’une zone blanche

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La carte vous l’avez regardée tous les jours mais c’est l’article du Soir qui vous a indiqué la zone pourtant toute blanche en plein centre. Comme si elle avait été ménagée pour que s’y inscrivent le nom de Bruxelles et celui de Brussel — et en anglais, on dit comment ?

Une ville au XXIème siècle en Europe s’offre une zone de plusieurs hectares, là, vingt-deux, juste sous son nom. « Aux pieds du site de Tour & Taxis » dans le journal. En flamand, pareil, on écrit « Tour & Taxis ». Phénomène remarquable lorsqu’on sait que même le nom du roi Baudoin devient Boudewijn, pour préférer l’oreille à l’œil, on imagine en francophone.

L’ancien port maritime de Bruxelles — Brüsel ou Brussel en flamand ? Un jardin participatif, un espace concerté, une inauguration de lendemain pour les riverains : ouvert ou fermé ? Ville longtemps sans gouvernement, port sans moules où s’arriment les paquebots des institutions européennes, à bord desquels on parle polyglotte comme dans le reste des villes de Bruxelles — Brüsel ou Brussel. Saint-Gilles, Ixelles, Anderlecht, Schaerbeek, Laeken… — Laken en flamand. Et pourtant c’est le même asphalte et les mêmes bus et le même train qui circulent de gare du Nord à gare du Midi. Quand on dit Bruxelles — il faut parfois penser Saint-Gilles, parfois Ixelles, parfois l’Europe toute entière et même avec la Grèce et le jaune et le blanc des plaques d’immatriculation, l’Europe de l’euro expliquée par un grand gars joliment barbu châtain clair à toi dans la rue — mais n’a-t-il pas entendu que je lui parlais en français ? Parfois Congo. Là surgit Tintin et son extraordinaire prise de conscience pour un européen, encore méconnue au cœur du Lotus Bleu. Retour aux espaces en passe de subjectivation. Le blanc de la carte.

Vous voici à Pannenhuis, sortis du métro aux grandes orgues orangées formées en stalactites depuis les années 70. La sonorité des cuivres et des vents, dès la sortie de la bouche, vous dirige vers l’hétérotopie d’une après-midi.

Aucune barrière tout à fait ouverte, ni tout à fait fermée.

Des portes d’odeurs et de sons s’ouvrent sur des villes à l’intérieur de la ville.

Le souvenir des rails strie un paysage fer invisible et trame la page dépliée sous vos pas.

Des sorties brandissent le nom d’entrée. Mais ces pièges, vous les connaissez.

Et Bruxelles serait le nom des interstices du décor.

Auparavant

La vieille en son paysage ordinaire

Ensuite

Caprice des dieux

1 Commentaire

  1. […] Retour aux espaces en passe de subjectivation. Le blanc de la carte. Vous voici à Pannenhuis, sortis du métro aux grandes orgues orangées formées en stalactites depuis les années 70. La sonorité des cuivres et des vents, dès la sortie de la bouche, vous dirige vers l’hétérotopie d’une après-midi.  […]