Le rouleau de Mississippi Riverbook
Une résidence au Chalet Mauriac
Mississippi Riverbook est un projet numérique (en savoir plus). Nous allons dérouler sur le web un grand paysage. Nous voulons retrouver la magie des panoramas mobiles du début du dix-neuvième siècle.
Première étape ici décrite : le rouleau de peinture.
Durant notre séjour de quatre semaines au Chalet Mauriac (écla Aquitaine), la priorité a été donnée à la création du rouleau de peinture. Nous avons ainsi passé beaucoup de temps à concevoir un scénario pictural, à faire des choix scéniques dans la perspective stimulante d’avoir le fleuve lui-même comme principal actant du récit.
Dans l’écran web, la peinture « dioramique » mettra ainsi en scène une forme épique moderne, celle d’un Mississippi métamorphosé par l’intervention humaine. Une géologie paradoxale s’y exprimera, entre nature et culture, à l’intérieur des plissements artificiels du sol, aux abords des murs de béton et d’acier qui protègent la ville et promettent « cent ans de réduction des risques climatiques », le long du trait de cote du Golfe du Mexique irréversiblement entamé, au contact de l’eau saumâtre qui gagne les terres intérieures et tue les marais, à la vue des cheminées fumantes des raffineries, dans la résonance sourde des secrets dômes de sel qui servent de stockage au pétrole, à l’intersection folle des quarante mille kilomètres d’oléoducs de la Louisiane, au son des remorqueurs qui guident les tankers et les vraquiers, à la rencontre des trailers parks miteux et des architectures blessées par Katrina…
L’enquête Gaïa in Nola, réalisée durant l’été 2015 avec le soutien de l’Institut français et de la Ville de Toulouse, a fourni un riche matériau documentaire dans lequel Matthieu a puisé pour créer un dossier de références visuelles par scène picturale. Tout est vrai. Bien sûr, cela ne va pas sans transfigurations, ellipses ou condensations. Pendant que Frédéric peint, Matthieu travaille aux textes et au scénario pour la voix et l’ambiance sonore.
Avant de réaliser la fresque couleur, un rough à l’encre de Chine et lavis a été composé sur papier esquisse. Une fois scanné et « jeté » dans une maquette web en Flash, il nous a permis d’appréhender toutes les subtilités de la frise déroulant sur écran et de voir l’économie générale du mouvement et des jeux optiques. Nos hypothèses ainsi éprouvées et éventuellement corrigées, la réalisation du rouleau original est ensuite exécutée avec le geste vif au pinceau, sans crayonné préalable, comme dans les performances de peinture en direct dont Frédéric est devenu coutumier dans notre collectif Urbain, trop urbain avec le projet Périph’Strip.
Pour notre fresque, nous avons choisi un papier italien de grammage épais, 300gr. Nous y avons découpé des lanières de 10 mètres de long, par 30 cm de haut. Frédéric travaille avec des encres de couleur à base de gomme laque, les Sennelier essentiellement.
La totalité du rouleau achevé mesure 26 mètres (distribué en trois parties). Avant que le site Internet existe — il faut du temps et des financements pour la partie technique ! —, le rouleau servira de maître accessoire pour des performances où nous retrouverons la magie scénique des panoramas mobiles, qui sont un des ancêtres du cinéma. Dans ce genre de spectacle, un narrateur commentait le défilement vertical du rouleau de peinture grand format en fond de scène, et chaque « tableau » faisait l’objet d’un récit accompagné au piano.
L’aventure de Mississippi Riverbook commence !
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