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LECTURE URBAINE

Scène, dispositif, tracé et sens de la ville

Stockholm, 1560

Sur l’acte de naissance des villes on lit d’abord un anéantissement de la campagne. Réintroduire la nature entre les bâtiments ne changera pas cette donnée fondamentale. Mais la campagne est pugnace, elle aime à resurgir. Elle renaît dès que l’emprise de la ville se relâche, parfois à quelques mètres de l’hyper centre lourd des quais de marbre et des dalles de béton.
Aqueduc Claudia (Felice)

Rome a possédé jusqu’à onze aqueducs pour alimenter ses fontaines publiques, ses thermes et ses citernes de quartier. La campagne romaine conserve encore la trace des arcades majestueuses de cet urbanisme de l’eau. La généralisation du béton dans le gros œuvre et l’exploitation des mines de plomb d’Espagne ont été deux conditions matérielles favorables à l’augmentation exponentielle de la quantité d’eau claire acheminée à Rome.
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Quand bien même mes impressions auraient été influencées par la période de ramadan dans laquelle je me trouvai plongée, et par l’ambiance de crise économique qui y règne depuis quelque temps, pourrait-on appeler «ville» une cité qui n’aurait ni centre, ni histoire, où les rues ne seraient faites que pour les voitures, où il n’y aurait pas de trottoir, où les habitants sembleraient absents, où tout se confronterait sans jamais se faire face?
Moscou, les cendres

En 2010, les aéroports de Moscou pris d’assaut par une population essayant de fuir leur habitat englouti sous une chape grise irrespirable, constituèrent un spectacle d’exode lent, stoïque et las. Quand l’Histoire violente n’est plus là, parfois les peuples reproduisent des réflexes enfouis de fuite, loin des traquenards de prisons déguisées en urbanités. En soi, les incendies touchant les larges zones forestières de la région moscovite tenaient de l’accident naturel. Ils ont plongé la capitale russe dans une atmosphère dramatique, meurtrière (les fumées toxiques y ont doublé le taux de mortalité quotidien, les hôpitaux censurant le terme de choc thermique) — mais étrangement belle aussi. De cette beauté des linceuls, à échelle de cité; les vivants et les avenues se faisant limbes.
Le grand parc du Puy-du-Fou

À première vue, un paysage de paysages, un monde clos. Par des allées ombragées, vous passez d’une scénette à une autre. Lorsque vous vous égarez, un panonceau indique la limite de la visite, et lorsque vous vous fourvoyez, vous arrivez à un grillage vert discret, limite du Grand parc. Rassurez-vous car il y a peu de chance de sortir des itinéraires prévus tant les choses sont bien organisées ici.
L'arrivée de Tintin à Shanghai dans le Lotus Bleu (Hergé).

Le « Lotus Bleu » est composé entre 1934 et 1935 par Hergé et Tchang Tchong-jen. La Shanghai des années trente, des concessions et de l’occupation japonaise y est le théâtre principal des aventures de Tintin. Shanghai est encore à l’époque d’Hergé une ville cosmopolite, la perle de l’Orient, le Paris de l’Asie du sud-est. Mais Hergé ne retient rien du cosmopolitisme de Shanghai…
8_11_2-Armelle Caron_Paris rangé © Armelle Caron

L’actualité artistique d’Armelle Caron nous invite à nous poser la question du langage de la ville. Dans le travail de cette artiste, les «villes rangées», la déconstruction du plan tire la ville vers le fragment; et les relations, qui étaient des vides, s’effacent dans ce morcellement.
Hong Kong (1)

Pearl river Delta. Le Delta de la rivière des Perles. Développé dans les années 1980 grâce à la proximité de Hong Kong et à la faveur de la politique économique des zones franches (les dragons), cette zone géographique a absorbé investissements et implantations industrielles à une échelle inouïe. Nature dénaturée, région restructurée, populations déplacées, interfaces villes-campagnes bouleversées… Une accélération productiviste qui par ses incidences sur l’architecture, l’habitat et l’urbain prend aussi des allures de test «grandeur nature».
tokyo_pmenard

Au début, c’est comme une distraction nouvelle. La ville ne construit pas son identité urbaine sur le passé mais sur le futur. L’épreuve de force est raisonnable. Une façon généreuse et risquée d’habiter le monde: comme chaque fois que le désir nous anime. La volonté de laisser un souvenir impérissable, faisons-le aussi pour l’énergie du futur.
Escalators de Peak Tower

Espace singulier dont la spécificité passe pourtant inaperçue… De la cave au toit, l’escalier délimite pourtant l’habitat. Jusqu’à la concurrence de l’ascenseur, son parcours clôt l’édifice dans sa raison d’être. Il «dessert»: pesons toute l’ambiguïté du verbe. Épreuve physique, l’escalier est le plus ingrat et asséchant des modes de déplacement. Instrument de sélection, il nie toutes les frictions mécaniques qui ne soient celles du piéton en bonne santé. Mais sans même parler de «concurrence», le monde mécanisé et automatisé a introduit du jeu dans la phénoménologie de l’escalier.