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Pearl river Delta, la grandeur Nature

Pearl river Delta, la grandeur Nature

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Pearl river Delta. Le Delta de la rivière des Perles. Développé dans les années 1980 grâce à la proximité de Hong Kong et à la faveur de la politique économique des zones franches (les dragons), cette zone géographique a absorbé investissements et implantations industrielles à une échelle inouïe. Nature dénaturée, région restructurée, populations déplacées, interfaces villes-campagnes bouleversées… Une accélération productiviste qui par ses incidences sur l’architecture, l’habitat et l’urbain prend aussi des allures de test «grandeur nature».

Comment penser cet arraisonnement de toute une géographie physique? Quelles sont les typologies à l’œuvre?

Distante de 65km par rapport à Hong Kong, de l’autre côté de l’estuaire de la rivière des Perles, Macao se paye le luxe d’une double libéralisation, à la fois par sa zone économique spéciale de Zhuhai, située en vis-à-vis, et par l’ouverture des établissements de jeu aux capitaux étrangers, depuis 2001. Sur la bande de Cotai, Venise vient d’être recréée par le géant du jeu américain, Las Vegas Sands. Drôle de nomadisation où Las Vegas s’invite en Chine par l’intermédiaire d’une Venise reconstituée, et véritable retournement dans lequel Robert Venturi s’y perdrait, lui qui affirmait dans «Learning from Las Vegas» que Las Vegas est la Venise des États-Unis! Sur la péninsule, même course à la construction des grandes compagnies mais avec une qualité architecturale parfois étonnante: MGM et ses trois boites ondulantes, Grand Lisboa et sa demi-bulle géodésique… Et toujours, ce contraste saisissant entre la technologie représentée par ces icônes architecturales et la mise en œuvre de démarrage par de simples bambous.

Shenzhen est à Hong Kong ce qu’est Zuhai pour Macao: une zone d’expérimentation des réformes pour la Chine selon le principe «un pays, deux systèmes». On y retrouve le même goût pour la nomadisation des icônes architecturales occidentales implantées dans un gigantesque parc à thèmes: «Windows of the world» où 130 des monuments les plus visités du monde sont représentés et dominés par les 108m de la Tour Eiffel. Déterritorialisation immédiate, mais peu importe car le message est ici que la Chine est capable de reconstruire sur son propre territoire les symboles occidentaux.

Duplication kitch ou répétition du même, à savoir le style international qu’on retrouve dans toutes les revues d’architecture du monde… Le Delta de la rivière des Perles ne semble pas pouvoir échapper à l’enfer de l’Un et du multiple.

Et Hong Kong? Hong Kong est située sur la rive orientale du Pearl river Delta, sur la côte sud de la Chine, baignée par la mer de Chine méridionale. Hong Kong est la ville du «plus»: la plus riche de Chine, une des plus libérales du monde, une des plus denses, des plus hautes. Ce «plus» est une masse qui, répliquée, ne pourrait que broyer l’individualité.[1] Mais Hong Kong a un Autre, un autre radicalement autre, et au regard duquel le travail du Même se dialectise pour laisser prise à l’individu, au singulier. En effet, les Nouveaux Territoires ont poussé l’étendue territoriale de Hong Kong bien au-delà de l’île historique de 77km² et du petit secteur de Kowloon, pour couvrir aujourd’hui 1070km² et regrouper 235 îles environnantes. Les Nouveaux Territoires ce sont cette grandeur Nature où est laissée en suspens la question de l’emprise/empreinte humaine.C’est un espace de transition entre la terre et la mer, en voie de concrétion par les débris portés par les trois rivières et juge véritable des activités humaines. C’est la grandeur Nature, la matrice qui fait face à la duplication infernale. Voir la «concrete jungle » de Hong Kong dont la peau de béton tente d’arrêter la jungle verte, sentir l’éruption des gratte-ciels hongkongais dont le rez-de-chaussée est à R+10 en affleurant le Peak permet de réaliser «in vivo» et «grandeur nature» cette dialectique de l’Un et du multiple en Chine.


 

[1] L’agence d’architectes français MAP OFFICE (Valérie Portefaix et Laurent Gutierrez) mène depuis vingt ans à Hong Kong une réflexion artistique et urbanistique sur l’émergence de l’individu et de la subjectivité en tant que possibilité de création et d’influence dans des configurations urbaines «dures». Voir la première partie d’un film sur cette question.

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1 Commentaire

  1. […] Ce billet était mentionné sur Twitter par Jeanne, Jeanne et aleph187b, URBAIN trop URBAIN. URBAIN trop URBAIN a dit: Pearl river Delta, la grandeur nature http://ow.ly/1QLLH /Un article Urbain, trop urbain #Hong_Kong #HK #urbanisme #paysage #architecture […]

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