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La Petite Ceinture ou la politesse en friche

La Petite Ceinture ou la politesse en friche

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Photographe italien résidant à Paris, Giuliano Ottaviani y interroge les espaces de friction entre l’urbain postmoderne et le legs, au demeurant fragile, de la ville industrielle.

Marcher sur une frontière qui n’en est plus une, marcher sur cette ligne de fer et de pierre dont la beauté païenne me semble inversement proportionnelle à la perte de vocation fonctionnelle… Vingt-trois kilomètres de circulation interdite, « interdite » parce que figée là, en attente devant le spectacle de grues et d’allotissements immobiliers qu’on nomme requalification urbaine. Hélas ! J’en suis persuadé. Il se passera désormais peu de temps avant que cet exotisme intérieur ne disparaisse complètement de Paris et me laisse avec mes clichés.

Il y a des espaces comme celui-ci, qui nous rendent nostalgiques par la seule anticipation de leur destruction prochaine. Il y a en eux l’abandon à la construction du regard, l’invitation à nous défaire des préjugés de cadrage. Et il y a, pardessus tout, l’aménité de ceux qui s’y rencontrent, sans doute parce que la friche les laisse se comporter en hommes libres.

Un jour que je remontai une section de la Petite Ceinture et constatai son rôle de refuge – pour la flore sauvage comme pour les laissés pour compte –, je croisai comme souvent un groupe de writers. Échange de vues, dialogues, flânerie commune le long des pierres… La zone te libère de certaines préventions sociales et t’incite à en cultiver d’autres. Je saluai bientôt ces compagnons de friche pour emprunter le nouveau  chemin écologique  ouvert entre la rue Balard et la rue Olivier-de-Serres. Je rencontrai alors une jeune-femme marchant poussette en avant sur les dalles fraîchement posées par la Ville. Je lui souris, je la salue par quelques mots. Elle, effrayée peut-être encore plus par mon accent « étranger » que par mes habits sales de randonneur au soleil d’août, détourne aussitôt le regard et file sans autre forme de procès. À ce moment précis, j’eu la certitude que j’étais bien revenu à Paris.

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Une ville "comme il faut"?

Ensuite

Périphérique intérieur

7 Commentaires

  1. […] Photographe italien résidant à Paris, Giuliano Ottaviani y interroge les espaces de friction entre l’urbain postmoderne et le legs, au demeurant fragile, de la ville industrielle. Découvrir son travail sur la Petite Ceinture.  […]

  2. […] Photographe italien résidant à Paris, Giuliano Ottaviani y interroge les espaces de friction entre l’urbain postmoderne et le legs, au demeurant fragile, de la ville industrielle. Découvrir son travail sur la Petite Ceinture.  […]

  3. […] Photographe italien résidant à Paris, Giuliano Ottaviani y interroge les espaces de friction entre l'urbain postmoderne et le legs, au demeurant fragile, de la ville industrielle. Découvrir son travail sur la Petite Ceinture.  […]

  4. Didier Lourdin
    à

    Le temps est venu de redonner à la première ligne de rocade parisienne sa fonction de transport public. En effet, en conjuguant réduction de la vitesse sur le périphérique, installation du péage urbain et mise en service d’un métro automatique rapide, fréquent, fiable sur l’ex petite ceinture, on donne enfin à Paris et à ses franges, l’outil majeur du développement économique et durable. Cette ligne est du plus haut intérêt général. Nous avons besoin de mobilité rapide. Les vélos, les piétons ont les rues. L’écologie moderne, le développement durable prône les modes alternatifs à la route. Un métro sur la Petite Ceinture, c’est l’anneau magique qui conduira aux Jeux Olympiques…

  5. Pierre Bocquiault
    à

    D. Lourdin a dit l’essentiel. Alors que Londres s’est fabriquée une Petite Ceinture, l’Overground, en raccordant, réhabilitant et mettant aux normes de son réseau ferré national, de 2010 à 2012, 4 anciennes tangentielles. faut-il que Paris, qui possède une rocade ferroviaire depuis 1869, la casse stupidement pour suivre quelques concepts à la mode souvent mal compris ? Non ! le « vivre ensemble » et la préservation de la biodiversité ne réclament pas que l’on casse cette infrastructure !
    Oui au maintien de la Petite Ceinture dans le réseau ferré national, à son exploitation par un métro léger à grand gabarit circulant en semaine de 7h à 20h seulement (plus de 90% de la fréquentation des réseaux a lieu dans cette plage horaire). La Petite Ceinture ainsi réactivée sera la chance de la couronne périphérique interne de Paris, si mal maillée sur les 3/4 de son territoire par le métro et les lignes régionales, si banale urbanistiquement et architecturalement, et pourtant en plein renouvellement urbain. En correspondance directe avec 7 ou 8 radiales régionales, la Petite Ceinture réactivée bénéficiera aussi à la métropole toute entière.

  6. Carmelo PICCIOTTO
    à

    Photographies intéressantes qui témoignent de l’état pitoyable dans lequel se trouve la majeure partie du chemin de fer en FRANCE , démantelé, délabré, abandonné … La majorité des vues démontre pourtant toute l’utilité de sa remise en activité, en aucun cas, incompatible avec la préservation du milieu naturel et tout à fait adaptée aux quartiers traversés ; Il faut ici dénoncer l’instrumentalisation forcenée de quelques riverain(e)s par des politiques sans scrupules et d’une grande hypocrisie ! En effet, pourquoi laisser alors construire encore et encore le long des voies ferrées ? L’inaction et la passivité de ses huit (8) décennies n’est guère plus tenable et nous souhaitons qu’une mise en oeuvre rapide du renouveau de l’infrastructure ferroviaire aboutisse .

  7. Jean FERDANT
    à

    Il y a écologie et écologie…

    L’écologie médiatique (ou à courte vue), qui propose de transformer n’importe quel lieu, en jardinet, « poumon vert » (sic), espace de verdure pour une bio-diversité « durable » (sic), lieu de respiration, « réseau vert », voie piétonne ou cyclable, etc.

    Il y a aussi – et heureusement – l’écologie réfléchie, pragmatique, intelligente, qui tient compte des réalités, qui ne se vautre pas dans l’illusion d’un monde de bisounours où il suffit de vouloir pour pouvoir ; où il suffit de former des vœux pour qu’un propriétaire légitime obéisse à un diktat politique (et gratuitement de surcroît !). Une écologie qui pense non seulement aux fleufleurs et au gadgets peints en vert, mais également à l’organisation d’une capitale, ce qui inclue fatalement la dimension transport, économie, régulation, prospective.

    Cette écologie-là se poserait les bonnes questions :
    – À quoi et à qui peut bien servir une ligne de chemin de fer circulaire autour d’une capitale congestionnée par plusieurs décennies de je-m’en-foutisme institutionnel en matière de transports ?
    – Pourquoi Paris serait-elle la seule grande ville au monde à vouloir nier le potentiel transport d’une emprise circulaire en site propre et réutilisable ?
    – Comment faire pour se déplacer entre des quartiers excentrés sans devoir passer par un centre saturé ou en utilisant un tram qui se traînée et est bondé aux heures de pointe ?
    – Comment se fait-il que les projets – souvent farfelus – concernant l’avenir d’une ligne ferroviaire soient émis par des candidats qui ne sont pas (ou très peu) des usagers des transports en commun ?
    – Pourquoi devrait-on complaire à quelques riverains paranoïaques (que l’on tente d’effrayer avec le spectre de trains de marchandises diesel de plusieurs centaines de mètres de long à 3h du matin), et mépriser ces Parisiens qui veulent pouvoir passer moins de 2 heures par jour dans des rames hors d’âge, sur des lignes qui craquent de partout ?

    Les surenchères verdâtres des candidats de cette campagne municipale sont un faux-nez. Les Parisiens ne sont pas assez stupides pour s’y laisser prendre…