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Personne ne domine Hong Kong

Personne ne domine Hong Kong

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Wong Kar-Wai réalise «Chungking Express» [1] peu avant la rétrocession de Hong Kong. Sans trame apparente, le film déroule deux histoires d’amour à Hong Kong, la nuit. L’unité, c’est le quartier, dans et autour de Chungking Mansion (Kowloon).

Construit dans les années 1960, Chungking Mansion est devenu, d’un ensemble d’appartements, une sorte de territoire d’asile pour toutes sortes d’immigrés, de désespérés ou de routards sans argent… 17 étages en cinq blocs. Peut-être cinq mille habitants… 200 caméras de sécurité. Une trentaine de petits hôtels bon marché desservis par des ascenseurs filmés jour et nuit. Pas de distinction, d’ailleurs, entre jour et nuit… Plusieurs des étages inférieurs composent une sordide galerie marchande, faite de boutiques improbables éclairées au néon.

Cette cité intérieure fait désordre dans la prestigieuse rue Nathan.Mais Chungking Mansion représente tellement d’intérêts croisés de petits propriétaires, de marchands de sommeil, de triades, etc., que les autorités de Hong Kong ont bien du mal à faire accepter l’idée de sa destruction future.

Au cinéma, un tel cadre renforce l’irréalité d’une trame ténue. Un bar, un dédale de vénielles, un fast food, une rue commerçante, quelques appartements… C’est un monde urbain, fait de ralenti et d’accélération. On vit enfermé dans la sensation du rythme, il n’y a pas de plan large, de retrait. L’énergie de la ville rince des personnages sombres ou les fait luire dans une tendre absence au monde. Les deux à la fois. Il semblent s’échouer sur l’amour, comme sur des récifs les bateaux trompés par les frères de la côte. Mais on s’échoue avec grâce, à Hong Kong.

Les ruelles sont organiques, la couleur y est surréelle, le quartier invisible… L’unité de lieu est un pur produit de la kinesthésie. Personne ne domine Hong Kong. On ressort pourtant de «Chungking Express» avec dans les veines l’énergie du refrain de « California dreaming », le tube des Mamas and Papas.


 

[1] Chungking Express. Wong Kar-Wai. 1994. Hong Kong. 102 min. Couleur. 35 mm. Interprètes: Takeshi Kaneshiro, Brigitte Lin, Tony Leung Chui-Wai, Faye Wong, Valerie Chow.

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Les vieux dans les parcs de la Chine

Ensuite

Havre de la mort

3 Commentaires

  1. […] Ce billet était mentionné sur Twitter par URBAIN trop URBAIN. URBAIN trop URBAIN a dit: Personne ne domine #Hong_Kong — à partir de Chungking Express, article Urbain, trop urbain http://ow.ly/1BtM2 […]

  2. […] oui. Non, pas la peine. Oui, Oui, quelques africains, aussi, on les mettra dans l’immeuble de Chungking. En tout? Beaucoup. Beaucoup-beaucoup! Tu imagines? 18 millions! Mais noooon… Je t’ai déjà […]

  3. […] Paulo. Je ne vous parlerai pas davantage des cas, déjà décrits ici, de Kowloon Walled City ou de Chungking Mansion, à Hong Kong. Je vous demande plutôt d’aller feuilleter un récent petit livre, […]

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