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Que représente la ville pour nous, aujourd’hui?

Que représente la ville pour nous, aujourd’hui?

Une réfélexion d'Italo Calvino.

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Je ne crois pas que le livre évoque seulement une idée atemporelle de la ville, mais plutôt que s’y déroule, de façon tantôt implicite, tantôt explicite, une discussion sur la ville moderne. J’entends dire par quelques amis urbanistes que le livre touche différents aspects de leur problématique, et ce n’est pas un hasard puisque le background est le même. Et la métropolis des « big numbers » n’apparaît pas seulement vers la fin du livre : même ce qui ressemble à l’évocation d’une ville archaïque n’a de sens que si on la pense et l’écrit en gardant sous les yeux la ville d’aujourd’hui.

Que représente la ville pour nous, aujourd’hui ? Je pense avoir écrit une sorte de dernier poème d’amour aux villes, au moment où il devient de plus en plus difficile de les vivre comme des villes. Nous nous approchons peut-être d’un moment de crise de la vie urbaine, et Les Villes invisibles sont un rêve qui naît au cœur des villes invivables. On parle actuellement avec la même insistance de la destruction du milieu naturel et de la fragilité des grands systèmes technologiques qui peut entraîner des dégâts en série, paralysant des métropoles entières. La crise de la ville trop grande est le revers de la crise de la nature. L’image de la « mégalopolis », la ville continue, uniforme, qui recouvre le monde, domine aussi mon livre. Mais il y a déjà tellement de livres qui prophétisent des catastrophes et des apocalypses qu’il serait pléonastique d’en écrire un autre, et surtout ce n’est pas dans mon tempérament. Ce qui importe à mon Marco Polo c’est de découvrir les raisons secrètes qui ont conduit les hommes à vivre dans les villes, raisons qui vaudront au-delà de toute crise. Les villes sont un ensemble de beaucoup de choses : de mémoire, de désirs, de signes d’un langage ; les villes sont des lieux d’échanges, comme l’expliquent tous les livres d’histoire économique, mais ce ne sont pas seulement des échanges de marchandises, ce sont des échanges de mots, de désirs, de souvenirs. Mon livre s’ouvre et se referme sur des images de villes heureuses qui prennent forme sans cesse et s’évanouissent, cachées par les villes malheureuses.

Conférence à propos des Villes invisibles, prononcée par Italo Calvino
à l’université Columbia de New York en 1983


Lire le texte intégral chez Antony Poiraudeau
Auparavant

The Phantasmagorical Clarence John Laughlin

Ensuite

Mighty Mississippi

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