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Matthieu Duperrex

Matthieu Duperrex

Philosophe, co-fondateur et directeur artistique d'Urbain, trop urbain.

Sur le parvis — 33_MAXXI_Ph_Simone_Cecchetti

Il s’agit d’une œuvre complexe que l’architecte Zaha Hadid a patiemment fait sortir de terre à Rome durant une décennie où se sont multipliés pour elle les concours remportés à travers le monde. Le MAXXI est en quelque sorte l’hypotexte de cette success story de l’architecture «paramétrique».
MAP-Taipei-©Aram Bartholl

Une foule sentimentale investit le monde comme «expérience», et donne corps à la ville. Entrons, reconnaissants, dans cette respiration, et que nul ne se soucie plus de l’arithmétique des rues et avenues de Manhattan sinon comme suite d’équations sans résolution.
The last child left behind - DEMILIT

Aux non-lieux du paysage urbain répondent de terribles solitudes morales. Allez-vous inscrire un « Follow us » sur votre maison pour rompre cette solitude? Argonaute moderne ou Robinson sur son île de béton, le solitaire se noie plutôt, quand il le peut, dans l’activité industrieuse, seul point de raccrochement à une condition moyenne, supposée la meilleure pourvoyeuse du bien-être.
Project Vision for a Highrise City, 1924

Avec l’habitant défini comme « usager » de la ville, se dessine une ville métaphorique par ses usages, qui se superpose à la première, bien matérielle, et la réfléchit par les pratiques de l’espace. Une compétence de l’espace appartient à l’habitant
Dogville

Les traditionnelles métaphores emboîtées de la ville qui la ramènent à un organisme ont l’avantage de dire l’entremise du lieu, sa dépense de liaison entre organes disparates, mais elles impliquent une téléonomie insupportable. Or, la ville est sans finalité. L’espace de la ville fournit des écarts à la norme, hybridations et bricolages du quotidien au bénéfice d’inventaire du poète ou du tératologiste.
Thermes de Caracalla dans Google Sreet View

Il faudrait se pencher, localement, sur les héritages urbains «inconfortables», sur les opérateur de mémoire collective qui disent vraiment le lieu et rien que lui mais qui ne sont pas dicibles dans le langage stéréotypé du patrimoine. Oui, il faudrait ne surtout pas se concentrer sur la labellisation des territoires à laquelle participe l’UNESCO et désormais, Google.
From the Washingtown Hotel in Rikuzentakata—©David Gilkey

Alors écoutant le mix des fréquences de police de New York ou bien d’une autre métropole, peu importe, je survole la ville hypnotique à travers un œil-caméra aléatoire. La grille des avenues perd son caractère euclidien et l’espace se tord et se séquence en tranches dans ce parcours sans visée particulière.
"kibera - shadow city" by Christian Als

Il est des villes dont le désir d’homme est ainsi suspendu qu’on ne sait si leur «année zéro» date d’avant ou d’après la catastrophe. Il est des villes qui disent l’obsolescence des espaces urbains avant même d’être achevées. Il est des villes qui sont des ruines modernes d’on ne sait quelle apocalypse. Il est des villes qui sont neuves d’être abandonnées —des cartographies de la désertion.
Armory Fence by Ivan Navarro

L’espace disciplinaire est une invention des villes : surveillance, recensement, répartition, division, exclusion… toutes techniques s’exerçant dans un espace délimité où vivent des populations humaines importantes.
Wall by the graffiti bombing artist Pantonio

Oui, «lever le paillasson», pas simplement en désignant virtuellement du réel à explorer, mais plutôt en inventant une nouvelle «surface», comme métaphore de mon quotidien urbain. Tel est le pouvoir de la fable.